HTTP : la gestion du cache

La gestion du cache décrite par la RFC 7234 est une part importante de HTTP. En effet, HTTP étant utilisé sur des réseaux peu fiables, la gestion du cache permet d’améliorer les performances ou de palier à des défaillances. Si un élément intermédiaire du réseau, ou même le client, dispose d’un système de mise en cache, il peut l’utiliser s’il sait que les données qu’il contient sont à jour ou si le serveur distant est temporairement indisponible.

HTTP ne préconise pas d’implémentation particulière pour un système de gestion de cache (en fait HTTP ne considère pas la gestion de cache comme obligatoire mais comme fortement recommandée). Par contre, HTTP propose des en-têtes de requête et de réponse permettant aux différents éléments d’un réseau (agent utilisateur, serveur d’origine et intermédiaire) de fournir des informations aux autres éléments sur la fraîcheur des informations et sur la stratégie de cache à privilégier.

Typiquement, un client pourra fournir des préférences sur le fait qu’il accepte ou non des données issues d’un cache. Un serveur indiquera un moyen de déterminer la date limite de fraîcheur de la réponse. Quant aux intermédiaires, ils peuvent se signaler s’ils décident de répondre en lieu et place du serveur d’origine.

La gestion de cache HTTP est un sujet complexe car elle implique de comprendre et d’utiliser des stratégies différentes ainsi que la mise en place d’heuristiques de calcul afin d’éviter des incohérences dans les réponses qui peuvent être fournies par un cache HTTP. Dans le suite du chapitre, nous nous limiterons donc aux principes généraux.

Les navigateurs Web les plus courants implémentent tous un cache local pour l’utilisateur.

Serveur d’origine et intermédiaires

Un serveur d’origine est celui qui fait autorité pour répondre à une requête. Par exemple, il peut s’agir du serveur qui détient un document particulier. En théorie, un client qui souhaite obtenir ce document doit faire une requête HTTP au serveur d’origine. Cependant, HTTP supporte le recours à des intermédiaires, formant ainsi une chaîne de connexions entre le client qui émet la requête initiale (appelé agent utilisateur ou user agent) et le serveur d’origine. Un intermédiaire agit à la fois comme un serveur (car il doit retourner une réponse à une requête cliente) et comme un client (car il doit obtenir l’information auprès de l’élément suivant dans la chaîne de connexions).

HTTP définit trois types d’intermédiaires :

proxy (serveur mandataire)

Un proxy est utilisé par un client pour transmettre des messages à sa place. Il est en général configuré pour accepter (ou refuser) des requêtes pour des URI particulières. Dans des organisations, un proxy est souvent utilisé pour transmettre des requêtes depuis un réseau interne vers un réseau publique (Internet). On résume l’action d’un proxy en disant qu’il se substitue à un client pour des requêtes vers N serveurs.

gateway ou reverse proxy (passerelle)

Une gateway (ou reverse proxy) est un intermédiaire qui agit comme un serveur d’origine. Les reverse proxies sont souvent utilisés comme des accelérateurs HTTP (pour la mise en place de cache). Ils peuvent également permettre d’isoler des serveurs d’origine d’un réseau publique ou non sécurisé. On résume l’action d’un reverse proxy en disant qu’il se substitue à N clients pour des requêtes vers un serveur.

tunnel

Un tunnel agit comme un relais entre deux connexions sans changer la nature des messages échangés. Un tunnel est utilisé pour établir des connexions sécurisées ou pour utiliser un protocole tiers à travers HTTP. Dans la mesure où HTTP impose que les messages circulant dans un tunnel ne peuvent pas être mis en cache, ce type d’intermédiaire ne nous intéressera pas dans ce chapitre.

Un proxy et un reverse proxy sont souvent pourvus d’un système de gestion cache. Dans le cas d’un reverse proxy utilisé comme accélérateur, il s’agit même de la principale raison de sa mise en place. Ces intermédiaires vont donc pouvoir décider d’écourter la chaîne de connexions en répondant directement à partir des données dont ils disposent en cache. Ils auront également besoin de contacter de temps en temps le serveur d’origine (directement ou indirectement) pour renouveler le contenu de leur cache.

Principe générale de la gestion du cache

Un cache est un ensemble de réponses précédemment reçues. Chaque réponse est associée à un clé d’identification. Si une nouvelle requête est émise avec la même clé d’identification, alors le gestionnaire du cache peut fournir une réponse à la place du serveur d’origine. La clé d’identification d’un cache correspond à l’URI de la ressource ainsi que la méthode HTTP de la requête et certains en-têtes de la requête. Le gestionnaire de cache est également responsable de la mise à jour et de la suppression des réponses stockées dans le cache

Les clients (agent utilisateur ou intermédiaires) peuvent disposer d’un gestionnaire de cache. Ce gestionnaire sera consulté avant d’émettre la requête vers le serveur.

Un client disposant d’un gestionnaire de cache suivra un algorithme proche de celui-ci :

  • Si la requête ne correspond à aucune réponse en cache, alors la requête est émise au serveur. Si la réponse l’autorise alors elle sera mise en cache. La reponse du serveur est utilisée comme réponse à la requête.

  • Si la requête invalide le cache, alors la requête est émise au serveur. En cas de succès, le gestionnaire de cache invalide une éventuelle réponse en cache. La reponse du serveur est utilisée comme réponse à la requête.

  • Si la requête correspond à une réponse déjà en cache, le gestionnaire de cache vérifie la fraîcheur de la réponse en cache :

    • Si la réponse en cache ne nécessite pas de revalidation auprès du serveur alors elle est utilisée directement comme réponse à la requête.

    • Si la réponse en cache nécessite une revalidation auprès du serveur alors la revalidation est effectuée :

      • Si le serveur considère que la réponse en cache est toujours valide, alors elle est utilisée directement comme réponse à la requête.

      • Si le serveur considère que cette réponse n’est plus valide, le cache est mis à jour à partir de la réponse du serveur et la réponse du serveur est utilisée comme réponse à la requête.

      • Si la requête au serveur échoue, soit une erreur est retournée en réponse à la requête soit le réponse en cache est utilisée comme réponse à la requête.

La fraîcheur d’une réponse

La capacité d’un gestionnaire de cache à juger de la fraîcheur (freshness) d’une réponse en cache est un mécanisme fondamental pour la gestion de cache. Une réponse en cache est considérée comme « fraîche » si elle peut être utilisée comme réponse sans que le serveur d’origine n’ait à la revalider.

La fraîcheur est déduite à partir d’une date limite. Cette date limite de fraîcheur est soit donnée par le serveur d’origine soit déduite à partir d’informations fournies par le serveur d’origine.

Le serveur peut fournir un des deux en-têtes suivants dans sa réponse pour permettre de calculer la date limite de fraîcheur :

Expires

L’en-tête de réponse Expires permet au serveur de donner la date limite de fraîcheur de sa réponse. Cela ne signifie pas qu’après cette date, la ressource cesse d’être valide ou même n’existera plus. Il s’agit juste de forcer un gestionnaire de cache à effectuer une requête de validation une fois cette date passée.

Si le serveur ne souhaite pas que sa réponse soit mise en cache, il peut fournir une date passée dans l’en-tête Expires.

En général, un gestionnaire de cache ne tiendra compte de l’en-tête Expires que s’il est accompagné de l’en-tête Date. Ce dernier donne la date du serveur au moment de la génération de la réponse. Cela permet au client d’effectuer d’éventuelles corrections d’horloge s’il existe des différences entre la date du serveur et la date du client.

La requête

GET /web+service HTTP/1.1
Host: www.dictionary.info

La réponse du serveur avec l’en-tête Expires

HTTP/1.1 200 OK
Content-type: text/plain; charset=utf-8
Date: Mon, 26 Mar 2018 15:00:00 GMT
Expires: Fri, 1 Jan 2021 00:00:00 GMT
Last-Modified: Sat, 24 Mar 2018 08:32:00 GMT
Content-length: 226

A Web Service is a method of communication between two electronic devices over a network.
It is a software function provided at a network address over the web with the service
always on as in the concept of utility computing.
Cache-Control

Cache-Control est l’en-tête au cœur de la gestion de cache en HTTP 1.1. Il est assez complexe à appréhender car il peut porter plusieurs informations et son interprétation change selon qu’il apparaît dans un requête ou dans une réponse. Pour l’instant, disons simplement que Cache-Control peut être utilisé pour retourner la directive max-age qui indique le nombre de secondes avant que la réponse ne soit plus fraîche.

La requête

GET /web+service HTTP/1.1
Host: www.dictionary.info

La réponse du serveur avec l’en-tête Cache-Control et la directive max-age

HTTP/1.1 200 OK
Content-type: text/plain; charset=utf-8
Date: Mon, 26 Mar 2018 15:00:00 GMT
Last-Modified: Sat, 24 Mar 2018 08:32:00 GMT
Cache-control: max-age=3600
Content-length: 226

A Web Service is a method of communication between two electronic devices over a network.
It is a software function provided at a network address over the web with the service
always on as in the concept of utility computing.

Si une réponse contient un en-tête Expires et un en-tête Cache-Control, alors un client capable d’interpréter les deux en-têtes doit ignorer l’en-tête Expires.

Si la réponse du serveur ne contient ni l’en-tête Expires, ni l’en-tête Cache-Control mais que la méthode HTTP de la requête est cacheable, alors le gestionnaire de cache peut appliquer une heuristique afin de déduire une date limite de fraîcheur.

La revalidation

Lorsqu’un gestionnaire de cache détecte qu’une donnée n’est plus fraîche. Il doit demander une revalidation auprès du serveur d’origine. La revalidation consiste à émettre une requête conditionnelle basée sur la date de dernière modification ou sur l’entity-tag selon les informations fournies précédemment par le serveur.

Le résultat de la revalidation dépend du résultat de la requête conditionnelle :

  • Si le serveur répond 304 (Not modified), alors la réponse en cache est utilisée comme réponse à la requête.

  • Si le serveur retourne une réponse complète avec un code 2XX, alors le serveur informe que la réponse en cache n’est plus valide. La réponse retournée par le serveur est celle utilisée pour répondre à la requête et le cache est mis à jour en accord avec la réponse du serveur.

  • Si le serveur ne répond pas (ou répond une erreur 5XX), alors il est possible de retourner l’erreur du serveur comme réponse (ou un 504 Gateway Timeout). Il est également possible de considérer que la réponse en cache est toujours valide afin de palier à une défaillance du réseau.

Les directives de stratégie de cache

Le serveur peut fournir des directives grâce à l’en-tête de réponse Cache-Control. Si le serveur souhaite fournir plusieurs directives, il lui suffit de les séparer par une virgule. Ces directives doivent être prises en charge par tous les caches traitant cette réponse. Parmi les directives possibles on retiendra :

no-store

La directive no-store indique qu’aucun cache ne peut stocker la réponse à cette requête. Elle est utilisée pour désactiver le support du cache pour cette réponse.

Attention, les directives ne sont pas fiables. Même si elles sont émises par un serveur, leur application dépend de l’implémentation des agents utilisateurs et des intermédiaires. Ainsi, la directive no-store ne suffit pas à garantir la confidentialité d’une réponse.

no-cache

La directive no-cache indique que le gestionnaire de cache ne pourra pas utiliser la réponse en cache sans l’avoir préalablement revalidée auprès du serveur. Cette directive n’empêche pas de stocker la réponse dans le cache mais impose que cette réponse ne soit jamais considérée comme « fraîche ».

must-revalidate

La directive must-revalidate indique que lorsque le gestionnaire de cache devra revalider cette réponse, il ne devra jamais utiliser la réponse en cache si jamais la revalidation échoue. Autrement dit, la revalidation doit réussir pour que la réponse en cache puisse être à nouveau utilisée.

La requête

GET /web+service HTTP/1.1
Host: www.dictionary.info

La réponse du serveur avec l’en-tête Cache-Control

HTTP/1.1 200 OK
Content-type: text/plain; charset=utf-8
Date: Mon, 26 Mar 2018 15:00:00 GMT
Last-Modified: Sat, 24 Mar 2018 08:32:00 GMT
Cache-control: no-cache, must-revalidate
Content-length: 226

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always on as in the concept of utility computing.

Dans l’exemple ci-dessus, le serveur notifie à un gestionnaire de cache qu’il ne peut pas utiliser cette réponse à nouveau sans avoir émis une requête de validation (signification de no-cache). Si cette requête de validation échoue, alors il doit impérativement retourner une erreur (signification de must-revalidate).

Le client peut également utiliser l’en-tête Cache-Control afin de spécifier des directives sur la façon dont un cache peut-être utilisé dans le traitement de la requête.

L’invalidation de cache

Une clé de cache est invalidée si une requête est émise pour une URI en cache avec une méthode HTTP qui peut modifier l’état du serveur : c’est-à-dire les méthodes non sûres POST, PUT, DELETE et PATCH. Le cache ne sera invalidé que si la réponse est un succès (code statut 2XX ou 3XX).

La difficulté de la mise en place d’un cache HTTP provient souvent du fait qu’il est possible d’atteindre un serveur d’origine sans passer nécessairement par le même gestionnaire de cache. Ainsi, si une réponse est mise en cache et qu’une requête PUT est émise vers la même ressource sans passer par le gestionnaire de cache, alors la réponse en cache devient invalide. Cependant, le gestionnaire de cache ne pourra détecter cette modification qu’une fois la date de fraîcheur dépassée pour la réponse. Il peut donc y avoir un temps de latence entre le moment où une ressource est modifiée et le moment où le gestionnaire de cache prend en compte cette modification.

Enrichissement des en-têtes par les intermédiaires

Les intermédiaires peuvent signaler leur présence en ajoutant des en-têtes dans la requête et dans la réponse. Dans le cadre de la gestion du cache, nous retiendrons plus particulièrement deux en-têtes :

Via

L’en-tête Via sert simplement à un intermédiaire à signaler sa présence en indiquant son nom et sa version. Cet en-tête n’est pas spécifique à la gestion de cache, mais il est utile de le connaître pour détecter la présence d’intermédiaire dans un échange client/serveur. Dans l’exemple ci-dessous, on supposera qu’il existe un proxy Squid utilisé comme intermédiaire.

La requête émise par le client

GET /web+service HTTP/1.1
Host: www.dictionary.info

La requête vue par le serveur

GET /web+service HTTP/1.1
Host: www.dictionary.info
Via: 1.1 squid

La réponse du serveur

HTTP/1.1 200 OK
Content-type: text/plain; charset=utf-8
Content-language: en
Content-length: 226

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It is a software function provided at a network address over the web with the service
always on as in the concept of utility computing.

La réponse du serveur vue par le client

HTTP/1.1 200 OK
Content-type: text/plain; charset=utf-8
Content-language: en
Content-length: 226
Via: 1.1 squid

A Web Service is a method of communication between two electronic devices over a network.
It is a software function provided at a network address over the web with the service
always on as in the concept of utility computing.
Age

L’en-tête Age permet à un intermédiaire de signaler qu’il a retourné une réponse en cache sans s’adresser au serveur d’origine. L’intermédiaire indique explicitement l’âge en secondes de la réponse depuis la dernière validation par le serveur d’origine.

La requête émise par le client

GET /web+service HTTP/1.1
Host: www.dictionary.info

La réponse retournée par le cache d’un intermédiaire

HTTP/1.1 200 OK
Content-type: text/plain; charset=utf-8
Content-language: en
Content-length: 226
Age: 22
Via: 1.1 squid

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It is a software function provided at a network address over the web with the service
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Dans l’exemple ci-dessus, le proxy Squid signale qu’il a directement retourné la réponse sans interroger le serveur d’origine. Le proxy estime que la réponse retournée a été validée par le serveur d’origine il y a 22 secondes.